C comme culte 21: Spetters, le chef d’oeuvre de Paul Verhoeven

 

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Réalisé par Paul Verhoeven – Écrit par Gerard Soeteman – Produit par Joop van den Ende
Sorti le 28 février 1980 aux Pays-Bas


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Avec : Hans van Tongeren, Renée Soutendijk, Toon Agterberg, Maarten Spanjer, Marianne Boyer
et les participations de Jeroen Krabbé dans le rôle de Frans Henkhof et Rutger Hauer dans le rôle de Gerrit Witkamp

Synopsis

Rien, Eef et Hans sont trois amis. Unis par leur passion pour le moto-cross, ils rêvent de gloire et de fortune mais l’arrivée de Fientje, une belle et sensuelle jeune femme va bouleverser leurs vies.

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En 1980, Paul Verhoeven est un cinéaste qui mène une carrière sans fautes aux Pays-Bas. La reconnaissance internationale value à Turkish Délices et Le choix du destin ont permis au cinéaste de forger son univers sulfureux et à disposer d’une liberté qui, jusque la, était indiscutable. C’est dans cet état d’esprit que Verhoeven et son scénariste fétiche Gerard Soeteman se sont lancés dans un film complètement différent, un film qui allait bousculer les conventions sociales de l’époque et allait permettre au « hollandais violent » de créer son premier scandale dans son pays, ce film c’est Spetters. Réalisé en 1980, ce drame social dépeignait les rêves et les désillusions de trois amis, unis par leur passion pour le moto-cross, au contact d’une belle jeune femme à la beauté aussi insolente que sensuelle. C’est probablement le film le plus subversif de Verhoeven, traité à l’époque d’anti-gay, anti-handicapé, anti-religieux et de misogyne (ce qui n’est ABSOLUMENT pas vrai !) et le tollé général qu’a suscité Spetters à sa sortie à conforté le réalisateur à s’exiler aux États-Unis.

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Jost Vacano, Hans van Tongeren, Paul Verhoeven, Marianne Boyer, Maarten Spanjer, Toon Agterberg et Renée Soutendijk

Le film commence tranquillement, il dépeint le quotidien de nos trois héros, Rien, l’ambitieux coureur promis à un bel avenir, Eef, le mécano bellâtre homophobe et Hans, le sympathique timide un peu looser sur les bords mais attachant. Entre sorties en boîte, réunions au garage de Eef, blagues de mauvais goût à des homosexuels et relations avec les petites copines, Verhoeven présente ses personnages et fait entrer le spectateur dans son film afin de mieux le préparer par la suite. Le ton des vingt premières minutes est abordé avec humour et on se laisse transporter aisément par cette bande de joyeux lurons. L’histoire commence véritablement lorsque apparaît le personnage de Fientje (magnifique Renée Soutendijk), tenancière d’un stand de frites avec son grand frère que les trois comparses rencontrent après une altercation avec une bande de motards. Aux premiers abords, on peut penser que Fientje, par sa beauté insolente et sa manière d’aguicher, n’est qu’une « garce » mais au fil du film on se rend compte que c’est un personnage fragile auquel on accorde le plus d’empathie car, venant d’un milieu pauvre, elle est « obligée » d’utiliser son corps pour arriver à ses fins et, comme les trois garçons, elle a le même but, sortir de sa misère et évoluer socialement. Tout à tour, elle va s’éprendre des trois garçons, et les conséquences des aventures éphémères se révèlent à la fois catastrophiques et heureuses (je n’en dis pas plus !). L’histoire semble classique mais le fait que Spetters n’est pas un film comme un autre vient du fait des thèmes abordés par Verhoeven. Dans un besoin de « choquer », Verhoeven se fait plaisir sur les thèmes : la vie, l’amour, le sexe, l’amitié, l’homosexualité, la critique acerbe d’une société endoctrinée par la religion, l’handicap et la mort… Tout y passe, et Verhoeven n’y vas pas avec le dos de la cuillère ! Par souci de réalisme, le réalisateur fait appel à des jeunes acteurs à la carrière encore naissante : Hans van Tongeren, Renée Soutendijk, Maarten Spenjer, Toon Agterberg, des acteurs à l’époque méconnus qui livrent tous des interprétations absoluments fabuleuses et crédibles de ces jeunes perdus en quête du bonheur, le film est un pur produit de Paul Verhoeven dans la mesure où il n’hésite pas à montrer des scènes de sexe très osées et particulièrement crues pour l’époque, notamment une scène de fellation homosexuelle non simulée et une scène particulièrement crue du viol de l’un des personnages par des hommes, des éléments qui constituent déjà la future carrière hollywoodienne du réalisateur. La mise en scène, caméra à l’épaule est parfaitement maîtrisée, pour la seconde fois de sa carrière, Paul Verhoeven a fait appel au directeur de la photographie allemand Jost Vacano (chef opérateur des premiers films allemands de Wolfgang Petersen) et livre une photographie saisissante, exit les couleurs chaudes et profondes de Turkish Délices, Soldaat van Oranje et autres Wat zien ik et place à une photographie plus sombre, moins colorée et plus triste de manière à mieux retranscrire le caractère âpre et violent du film. Ajoutons à cela le scénario de Gerard Soeteman, bien rythmé et exempt de longueurs, on ne voit pas passer les deux heures que constituent le métrage et la bande-son, typiquement 80’s (Blondie, Iggy Pop…) donne un certain charme au film.

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34 ans après sa sortie aux Pays-Bas, le film n’a rien perdu de son charme, avec un sujet toujours d’actualité, Spetters est un film sulfureux, violent et âpre, véritable coup de génie de la part de Paul Verhoeven, c’est, à mon sens le meilleur film du cinéaste. Tout son cinéma est résumé en deux heures et vraiment, je n’ai pas vu le temps passé. Avec son lot de scènes érotiques et osées, l’humour propre à Paul Verhoeven à certains moments et son interprétation parfaite, mention spéciale aux deux « invités » : Rutger Hauer et Jeroen Krabbé, acteurs fétiches de Verhoeven, qui sont sublimes dans des rôles d’êtres sans scrupules, arrogants et véritablement « connards » de l’histoire, Spetters est un véritable OVNI cinématographique, défoncé par la critique et le public, doublé d’un scandale complètement inutile à sa sortie, ce chef d’œuvre méconnu de Paul Verhoeven mérite la seconde chance que tout film maudit se doit d’avoir ! Ce film est, à mon sens, le meilleur film de Paul Verhoeven, l’un de ses plus aboutis et surtout, l’un des plus intéressant. C’est un film qu’il faut absolument (re)découvrir, et je ne peux que vous encourager de le regarder, et que vous aimiez où non, ce film ne laissera personne indifférent !Spetters c culte 217

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